LA NAVIGATION « EN ETAT POST MORTEM »
Jadis, y’a pas si longtemps, les plaisanciers naviguaient…
Ils partaient trois semaines « faire » la Corse ou les Baléares, lorsque les terriens s’attaquaient eux, aux châteaux de la Loire. Bien consciencieusement, à tous, même ceux qui sont en réalité sur ses affluents, l’Allier ou le Cher !
Depuis, les chefs de clans « recomposés », n’ont plus le choix. Ils ont pu négocier dix jours max avec leur ex et la famille adverse, au mois d’Août avec le gros de la troupe, histoire de s’agglutiner bien tous au même endroit, autour du même port, des fois que le temps se gâte.
Les mairies bobo l’ont bien compris, au lieu de s’emmerder avec les pontonniers habituels, ils peuvent placer les marmots de leurs potes qui viennent d’échouer le bac, un gilet de sauvetage, un zodiac, une phrase à retenir : « Le port est complet » (du week-end de Pâques à celui du 15 Août). Ces nouveaux employés municipaux, du style « Chevaliers du fiel », ont tôt compris leur rôle qui consiste à encaisser un salaire pour ne surtout pas se mettre à la disposition du plaisancier qui indirectement les paye.
Car, comme tout le reste, impôts, carte grise, tout se joue sur le Net, où le technocrate de service a pondu un beau site sur lequel, le 2 Janvier au matin, tu dois réserver ta semaine de port. Pas le choix, du samedi au samedi, comme t’as déjà l’habitude aux sport d’hiver, dans la studette où t’as une semaine de propriété. Ne connaissant pas exactement les dates que va t’imposer ton ancienne amoureuse, qui part toujours elle en juillet, tu vas réserver Porquerolles du 2 au 9 ou du 9 au16, (le 1 et le 8 sont un Dimanche), en promettant d’arriver dans la soirée, le temps de laisser réparer la pendille avec laquelle le précédent locataire, étourdit ou maladroit, sera probablement parti….
Les loueurs ont bien compris le système et les ports alentour ont « disproportionné » les pannes réservées à la loc, qui sont devenues obèses.
Les constructeurs aussi d’ailleurs, en réduisant les réservoirs d’eau et de fuel, au profit des machines à glaçons et autres machines à laver, d’électronique inutile source de coûts prohibitifs et de pannes, de joystick et de pods qui sont venus remplacer nos bonnes lignes d’arbres dans la propulsion. Tu sais jouer à la PlayStation, tu peux naviguer !
Et tout le monde a fait de même. Le navigateur qui veut désormais naviguer doit partir en Mai, histoire de trouver un anneau et se cailler les meules. Dès que l’on approche un site quelque peu connu, Capri, Lipari, Porto Azzuro, Saint Florent, Calvi ou Porquerolles, plus aucune possibilité d’accès en des lieux où, par l’offre et la demande, les prix ont désormais triplé, à l’inverse du service.
T’es forcément au mouillage, traversé par des annexes à la vitesse de 30 nœuds. On t’a filé à garder deux beaux enfants entiers, tu risques d’en rendre quatre moitiés mâchouillées par les hélices de ces connards. T’as mouillé près du port ? Histoire d’aller faire trois courses avec ton pneumatique écolo-électrique, t’as les navettes qui entrent et qui sortent aux mêmes 30 nœuds, histoire de te faire la vague qui va te pourrir le petit déjeuner, renversé sur le teck…
Quand c’est pas la météo pourrie, que même Météo Consult n’arrive plus à prévoir, tellement t’as balancé de gaz rares dans cette pauvre atmosphère. Même que Greta est aujourd’hui obligée de rater l’école le vendredi, pour venir te le rappeler et ruiner une ambiance déjà plombée !
Sur la côte, c’est l’horreur, en Corse et en Italie c’est pire !
Alors bon, c’est devenu ainsi. Il n’y aura jamais assez de remontées mécaniques en Février et entre Noël et le jour de l’an, beaucoup trop en Août. L’inverse pour les ports, plus assez de mairies et d’églises pour se marier un dimanche de Juin. Mais c’est moins net ; on se marie moins et de moins en moins devant monsieur le curé (faut dire que pas mal sont en garde à vue !).
Uglione va sûrement trouver mon blog du jour aigri et un tant soit peu réac. C’est pas faux. A ma décharge, plus je me rapproche des îles d’Hyères, plus l’air de la montagne me gagne !